Jeudis des fiscalistes - Laëtitia Pignier - L’administration fiscale confirme en partie la tolérance annoncée par le législateur pour les loueurs de meublés de tourisme non classés
Le régime fiscal de la location meublée a été largement discuté en préparation de la Loi de finances, l’attractivité fiscale de ce dispositif étant considéré comme favorisant les locations saisonnières de type « AirBnB » au détriment des locations d’habitation longue durée.
Les amendements proposés visaient à réduire les avantages du régime micro-BIC de la location meublée de courte durée et à l’aligner sur celui du régime micro-foncier de la location nue.
Certains amendements allaient plus loin et proposaient de réduire les avantages d’imposition de la plus-value de cession pour les loueurs en LMNP (Location Meublée Non Professionnelle).
Sous ce statut en effet, la plus-value lors de la cession du bien relève du régime de la plus-value immobilière des particuliers (prix de revient majoré des frais d’acquisition et travaux non déduits (ou forfait sous conditions) et abattement pour durée de détention exonérant définitivement la plus-value au terme de 22 ans pour l’IR et 30 ans pour les prélèvements sociaux).
Un amendement proposait d’aligner le régime des plus-values de cession en LMNP avec celui de la LMP (Location Meublée Professionnelle), c’est-à-dire avec le régime des plus-values professionnelles. Dans ce régime, le prix de revient n’est pas majoré et est au contraire minoré des amortissements pratiqués, ce qui augmente la plus-value imposable dite à court terme.
Cette proposition de modification du calcul des plus-values de cession en LMNP n’a finalement pas été retenue et seules les modifications du régime micro-BIC ont été votées.
Ces modifications ont elles-mêmes donné lieu à de nombreuses discussions sur le type de location meublée concernée, les plafonds et les taux d’abattement retenus.
Fin décembre, dans le cadre de la navette parlementaire, le Sénat a revu la proposition adoptée par l’Assemblée nationale en première lecture, en réduisant significativement les avantages du micro-BIC.
Bien que le gouvernement ne soutenait pas l’amendement du Sénat, cette proposition a néanmoins été incluse dans le projet définitif de Loi de Finances pour 2024 et a modifié l'article 50-0 du code général des impôts et baissé le seuil des recettes à partir duquel les loueurs en meublés de courte durée relèvent automatiquement du régime réel (art. 45 de la loi n° 2023-1322 du 29.12.23).
Si leurs recettes dépassent 15 000 € (au lieu de 77 700 € jusqu'à présent), ils ne peuvent plus rester dans le régime micro BIC. Quant à l'abattement forfaitaire dont ils bénéficient pour couvrir leurs charges, il passe à 30 % seulement au lieu de 50 %.
Les meublés de tourisme classés peuvent quant à eux bénéficier d’un taux d’abattement de 51 %, au lieu de 71 % auparavant, sous deux conditions cumulatives :
- Le bien n’est pas situé dans une zone de déséquilibre d’offres et de demandes de logements. Il doit donc se situer dans les zones non tendues.
- Le chiffre d’affaires HT de l’année précédente doit être inférieur à 15.000 €.
Ces nouvelles règles d’imposition étant applicables dès l’imposition des revenus de 2023, les loueurs de meublés de tourisme non classés ne relèvent plus en principe de plein droit du régime micro-BIC en 2023 si le chiffre d’affaires hors taxe réalisé en 2022 et 2021 est compris entre 15 001 € et 77 700 €.
L'exécutif a immédiatement réagi en soulignant que cette erreur serait corrigée et qu'aucun particulier ne subira cette nouvelle fiscalité.
Afin de limiter les conséquences d’une application rétroactive de cette mesure, l’administration admet, dans le cadre d’une mise à jour du bofip du 14 février 2024, que les loueurs de meublés de tourisme non classés peuvent continuer à appliquer aux revenus de 2023 les dispositions de l’article 50-0 du CGI dans leur rédaction antérieure à l’article 45 de la loi de finances pour 2024.
L’administration souligne par ailleurs, que l’abattement supplémentaire de 21 % s’applique aux loueurs de meublés de tourisme classés lorsque ces derniers ne sont pas situés dans des zones géographiques se caractérisant par un déséquilibre important entre l’offre et la demande de logements et que le chiffre d’affaires hors taxe afférent à l’ensemble des activités de location de locaux meublés n’excède pas au cours de l’année civile précédente 15 000 €.
En conséquence, si les loueurs en meublés concernés n’ont plus à s’inquiéter d’un changement de régime en 2023, il reste possible que ces règles s’appliquent aux locations de l’année 2024 sauf à ce que la loi de finances pour 2025 modifie à nouveau l’article 50-0 du CGI.
L’incertitude sur les modalités d’impositions des locations 2024 ne sera donc levée qu’à la fin de l’année.
Avocat associé.
Contact : laetitia.pignier@arbor-tournoud.fr
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