Jeudis des fiscalistes - Marie-Laure Mascoli - « Pas de bras pas de chocolat » en matière de TVA
L’artisan maçon a bien cru lui aussi à une blague carambar en prenant connaissance de la décision du Conseil d’Etat rendue en avril dernier portant sur son droit à déduction de la TVA (Conseil d'Etat - 8ème chambre 22 avril 2022 / n° 455114).
Son entreprise individuelle de maçonnerie a fait l’objet d’une vérification de comptabilité au titre des années 2011 à 2013 conduite selon procédure d’évaluation d’office prévue par l’article L 74 du LPF en cas d’opposition à contrôle fiscal : les bases d’imposition à l’impôt sur le revenu et à la TVA ont donc été évaluées à partir des encaissements bancaires.
Des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu au titre des années 2011 et 2012 et des rappels de TVA au titre de la période du 1er janvier 2011 au 30 novembre 2013, assortis des intérêts de retard et de la majoration de 100 % pour opposition à contrôle, ont été mis en recouvrement.
Monsieur Maçon fait valoir que si l’administration dans le cadre de la reconstitution de son résultat soumis à l’impôt sur le revenu a bien tenu compte des charges exposées par lui, il n’en a pas été de même pour la reconstitution de la TVA.
En effet, le Conseil de Monsieur Maçon alertait les magistrats sur le fait qu’étant entrepreneur en bâtiment, son client a nécessairement payé de la TVA sur ses factures d’achat.
Les juges d’appel se sont montrés sensibles à cette ligne d’argumentation.
Ils ont retenu qu’« à partir du moment où l’administration a reconstitué les recettes réalisées par M. R. à partir des encaissements constatés sur ses comptes bancaires, et ce, sans factures, et a admis un montant de charges au titre de l’activité exercée, elle ne peut refuser de déduire la TVA grevant les achats nécessairement effectués par M. R. pour l’exercice de cette activité pour la seule raison que ce dernier n’est pas en mesure de présenter des factures ». Ils en ont tiré que la méthode retenue par le service était, sur ce point précis, excessivement sommaire.
Le Conseil d’Etat censure cette décision :
Il n’y a pas de parallélisme des formes possible entre les méthodes de reconstitution du bénéfice net et celles applicables en matière de TVA.
Un redevable ne peut pas déduire la taxe ayant grevé des opérations pour lesquelles il n’a présenté aucune justification des factures ou documents en tenant lieu au cours de la vérification ou devant le juge de l’impôt alors même qu’elle aurait grevé les achats faits pour les besoins de l’exploitation du redevable.
Conformément à la jurisprudence européenne faisant application de la directive TVA, la jurisprudence française rappelle ainsi au visa de l’article 271 du CGI que la déduction de la TVA est subordonnée à la production d’une facture du fournisseur.
Marie-Laure Mascoli,
Juriste.
Contact : marie-laure.mascoli@arbor-tournoud.fr
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