Jeudis des Fiscalistes - Marie Laure Mascoli - Contentieux du recouvrement : quand tout est perdu, tout n’est pas perdu …
L'administration fiscale avait déposé plainte à l'encontre d’un client du cabinet, gérant d’une société, lui reprochant d’avoir frauduleusement soustrait la société qu’il dirigeait à l'établissement et au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). La responsabilité fiscale du dirigeant peut, en effet, être retenue dans diverses hypothèses et l’administration fiscale dispose d’un arsenal de dispositions législatives propres à lui permettre d’adjoindre un nouveau débiteur (et donc un nouveau patrimoine) au paiement de la dette initialement due par un seul redevable.
Ici, le dirigeant avait été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour fraude fiscale puis condamné pénalement à des peines d’emprisonnement, d’interdiction de gérer et amendes, lesdites peines étant assorties au plan de civil d’une condamnation solidaire au paiement des dettes fiscales de la société.
Ainsi le dirigeant a été rendu destinataire d’une mise en demeure de payer en date du 9 juin 2021 visant le recouvrement d’une somme de 271 384 €, en application des dispositions de l’article 1745 du CGI, et en vertu de :
- Un jugement contradictoire et en premier ressort rendu par le tribunal correctionnel de Grenoble le 7 mai 2012
- Un arrêt contradictoire de la Cour d’appel de Grenoble en date du 5 février 2013
- Un arrêt de rejet rendu par la Cour de Cassation en date du 12 juin 2014
Les jeux étaient donc faits :
la société avait été redressée et la « facture de l’administration » émise à son encontre en la forme d’un avis de mise en recouvrement ,
Le dirigeant condamné par une décision du tribunal correctionnel définitive après cassation solidairement au paiement des impôts fraudés et pénalités afférentes mis à la charge de l’entreprise,
et les hostilités sur le terrain du recouvrement avaient commencé avec l’envoi d’une mise en demeure au dirigeant, visant son patrimoine et ses revenus personnels,
Toutefois, l’infortuné dirigeant a finalement été déchargé de l’obligation de payer, au profit d’une opposition à poursuite fondée sur la prescription de l’action en recouvrement.
Le délai de prescription de l’action en recouvrement est celui pendant lequel l’administration fiscale peut poursuivre le recouvrement forcé de ses impositions ou pénalités. Il est régi par l’article L274 du LPF et varie entre 4 ans, 5 ans et 10 ans selon la solidarité visée, les peines prononcées et la nature du titre émis.
Ainsi, à défaut d'action du comptable des finances publiques pendant un certain délai fixé par la loi (le plus souvent quatre ans), celui-ci perd son droit d'agir contre le débiteur qui se trouve libéré de son obligation de paiement.
Bien entendu, obtenir une telle décharge de l’obligation de payer ne va pas de soi. Il s’agit d’une démarche contentieuse particulière, qui s’engage sur le terrain du contentieux du recouvrement.
Le contentieux du recouvrement est un contentieux de dernière chance, semé d’embuches.
Il faut noter en particulier que les délais de recours contre les actes de poursuite sont très brefs, soit deux mois en règle générale.
La réception d’un acte de poursuite (commandement de payer, avis de saisie à tiers détenteur) constitue donc une urgence contentieuse, qui appelle la consultation immédiate d’un avocat spécialisé.
En effet, même quand tout parait perdu, il reste peut-être quelque chose à faire …
Contact : marie-laure.mascoli@arbor-tournoud.fr
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